Projet 2501

Projet 2501

Par Damien Le Liboux

Phase I : Le rieur

 

« Accréditation acceptée. Bonjour professeur Vayn.

— Bonjour S.C.I.A. »

La porte coulissante du laboratoire s’ouvrit et le professeur Hermann Vayn pĂ©nĂ©tra dans le local Ă©clairĂ© par la douce lumiĂšre des diodes Ă©lectroluminescentes.

« S.C.I.A, affiche le rapport d’activitĂ© de la nuit, je te prie. »

Des Ă©crans holographiques apparurent sur la table de travail et diffusĂšrent des diagrammes colorĂ©s en trois dimensions. La voix synthĂ©tique fĂ©minine entreprit un rapide rĂ©sumĂ© des Ă©vĂšnements importants : « L’algorithme Λ parvient avec succĂšs Ă  limiter la dĂ©cohĂ©rence du processeur quantique, cependant les sondes treize et vingt-sept ont indiquĂ© plusieurs anomalies thermiques Ă  des frĂ©quences rĂ©guliĂšres  »

Hermann, qui venait de poser son attachĂ©-case, fronça les sourcils et parcourut d’un Ɠil circonspect les donnĂ©es de l’écran :

« Le réamorçage des sondes a-t-il été conforme à la procédure standard ? »

Le scientifique se dirigea vers la surface vitrĂ©e opaque qui recouvrait le fond du labo. À son approche, elle devint translucide et les entrailles du super ordinateur se dĂ©voilĂšrent.

« Oui professeur, la procĂ©dure de rĂ©amorçage s’est correctement effectuĂ©e Ă  quatre reprises mais la derniĂšre tentative a Ă©chouĂ© pour des raisons inconnues. Un remplacement des sondes treize et vingt-sept est prĂ©vu pour cet aprĂšs-midi Ă  13 heures 00 par l’agent Franck Bishop, accrĂ©ditation Tropo30/26. Souhaitez-vous que j’avance l’intervention ? »

Hermann plongea la main dans la poche de sa veste et en sortit une capsule bleue. Au bout de la piĂšce, un petit robot d’assistance s’activa et lui apporta un verre d’eau fraĂźche. Perdu dans la contemplation du cƓur de la machine, il prit son temps pour rĂ©pondre :

« Oui, contacte la maintenance et fais venir quelqu’un au plus vite. »

L’intelligence artificielle s’exĂ©cuta et des « bips » rapides rĂ©sonnĂšrent dans la piĂšce.

L’Ɠuvre de sa vie se tenait devant lui, majestueuse et porteuse d’espoir. Depuis la fin de ses Ă©tudes, il s’était Ă©chinĂ© Ă  promouvoir son projet d’ordinateur quantique de nouvelle gĂ©nĂ©ration. Combien de nuits avait-il passĂ©es Ă  peaufiner le processeur et Ă  dĂ©finir l’algorithme Λ ? Certainement beaucoup trop selon son analogie fĂ©minine, celle qui eut la brillante idĂ©e de demander une rĂ©affectation au Centre de PerpĂ©tuation RaisonnĂ©e de l’Être Humain le jour de sa nomination au poste de directeur de projet. Qu’elle n’entrevoie pas la possibilitĂ© de procrĂ©er avec lui une descendance Ă©tait une chose, mais qu’elle choisisse ce jour symbolique pour manifester son dĂ©sengagement relevait de l’irrĂ©vĂ©rence ! C’était donc seul qu’il avait dĂ» se rendre Ă  la soirĂ©e organisĂ©e par le ComitĂ© Central pour cĂ©lĂ©brer son accession au poste. Ce soir-lĂ , ses anciens mentors l’avaient congratulĂ© et ses futurs collĂšgues s’étaient empressĂ©s d’échanger un mot avec le nouveau gĂ©nie de la quanta informatique. Son travail Ă©tait enfin pris en considĂ©ration et ses compĂ©tences reconnues par ses pairs. Cette nuit-lĂ , et pour la premiĂšre fois de sa vie, il s’était enivré ; par mimĂ©tisme plus que par envie. HĂ©las, Ă  la diffĂ©rence de ses homologues, il n’était pas familier de ce genre de rĂ©ception, il n’en maĂźtrisait pas les codes. L’absence de son analogie fĂ©minine, son interface sociale comme il l’appelait, n’était pas lĂ  pour corriger son attitude.

Huit annĂ©es s’étaient Ă©coulĂ©es depuis. Le temps avait commencĂ© son ouvrage et ses tempes parsemĂ©es de cheveux blancs lui rappelaient de se hĂąter dans ses recherches. À trente-neuf ans il n’était pourtant pas vieux. Il lui restait bien un bon siĂšcle pour aboutir dans ses investigations avant d’entamer sa dĂ©gĂ©nĂ©rescence cognitive. Ses recherches, sa vie. Rien ne l’enthousiasmait plus que de se retrouver devant le mur de plasma qui le sĂ©parait de son bĂ©bĂ©. Il ne pouvait s’empĂȘcher de s’enorgueillir de son Ɠuvre et de ses capacitĂ©s. Toutes ces questions qui, pour l’instant, demeuraient sans rĂ©ponse : la rĂ©solution de l’équation de Drake, le dĂ©passement thĂ©orique du mur de Planck, l’instauration de nouveaux protocoles d’échanges entre ordinateurs. Et tout ceci grĂące Ă  son enfant


Il lui importait peu de transmettre son patrimoine gĂ©nĂ©tique supĂ©rieur Ă  une engeance qu’il ne verrait pas grandir : il avait sa propre progĂ©niture, l’accomplissement de ses aspirations profondes. VoilĂ  sept ans qu’il voyait le systĂšme Ă©voluer, apprendre, dĂ©finir de nouveaux paradigmes. À quoi bon donner naissance Ă  un bambin qui serait placĂ© dans une pouponniĂšre aseptisĂ©e, puis dans un institut de dĂ©veloppement cĂ©rĂ©bral oĂč il serait Ă©valuĂ©, jugĂ© et enfin affectĂ© Ă  une tĂąche prĂ©cise ? Son Ɠuvre, elle, avait toute l’étendue des champs de possibilitĂ©s devant elle. Elle pouvait Ă©chapper aux dĂ©terminismes humains et explorer l’univers grĂące Ă  ses infinies virtualitĂ©s.

« Professeur Vayn ? Professeur Vayn ? insista la voix rauque de l’agent de maintenance.

— Heu
 oui, la maintenance ?

— Affirmatif, professeur. Je suis Maxime Platz, agent de maintenance, accrĂ©ditation tropo25/14, vous m’avez appelé ?

— En effet. Pourriez-vous venir dans la zone trente et une afin d’effectuer le remplacement des sondes treize et vingt-sept du projet deux mille cinq cent un ? questionna Hermann d’une voix monocorde.

— Bien entendu professeur. Je serai là dans quinze minutes avec les piùces de substitution.

  • À tout de suite. »

La communication s’acheva et un indicateur de tĂ©lĂ©chargement apparut sur les Ă©crans pour signifier l’envoie des rĂ©fĂ©rences des sondes.

Toujours devant le panneau composite, Hermann entendit une alarme stridente se dĂ©clencher. Comme Ă  l’accoutumĂ©e lors de ce type d’incident, il entama la procĂ©dure d’arrĂȘt des nƓuds du cluster. AprĂšs chaque Ă©tape, il Ă©numĂ©rait Ă  voix haute l’action qui venait d’ĂȘtre effectuĂ©e et S.C.I.A validait l’intervention.

« Démarrage de la cryostabilisation du processeur quantique. »

AprĂšs quelques secondes de silence, Hermann rĂ©pĂ©ta l’intitulĂ© de l’étape. Toujours aucune rĂ©ponse.

« S.C.I.A. ? Que se passe-t-il ? »

La voix synthĂ©tique s’était tue laissant le professeur dans l’incomprĂ©hension.

Il vérifia les écrans dans le calme bien que son front, qui commençait à briller de sueur, trahissait son inquiétude.

Que se passait-il ? L’instabilitĂ© de l’algorithme Ă©tait Ă  l’origine de ce type d’incidents, mais jamais ils n’avaient causĂ© la dĂ©faillance du SystĂšme de ContrĂŽle par Intelligence Artificielle. Sa tension retomba lorsqu’il aperçu la date sur le moniteur : mercredi ; jour de la maintenance du cerveau central du complexe de Shield Valley. Cette indisponibilitĂ© de S.C.I.A ne durerait que quelques minutes et, une fois le processus d’arrĂȘt effectuĂ©, il pourrait reprendre ses recherches de maniĂšre optimale avec l’aide de son assistante machinique. Hermann ne se considĂ©rait pas comme un dĂ©viant autiste – ce genre de troubles gĂ©nĂ©tiques avait presque disparu grĂące au dĂ©codage du gĂ©nome humain –, mais toute sa vie Ă©tait exclusivement consacrĂ©e Ă  ses expĂ©rimentations. Son univers se limitait Ă  son appartement de fonction, au laboratoire et aux colloques interdisciplinaires organisĂ©s par le ComitĂ© Central. Toutes les suites tĂ©lĂ©ologiques de sa vie convergeaient vers une seule finalité : le projet 2501. Une fois cependant il s’était, malgrĂ© lui, extirpĂ© de cette modalitĂ©. Lors de sa vie estudiantine, il avait vĂ©cu une idylle qui avait crĂ©Ă© chez lui un Ă©trange sentiment de plĂ©nitude. Ces Ă©tudes Ă©taient devenues vaines, il n’éprouvait plus ce besoin inextinguible de percer les mystĂšres de la quanta-informatique. Comme si la simple prĂ©sence de cette jeune fille Ă  ses cĂŽtĂ©s parvenait Ă  rĂ©frĂ©ner son inclination pour les sciences. Il avait, l’espace de quelques semaines, entrevu un autre avenir ; une autre destinĂ©e que celle des laboratoires et de la vie bien ordonnĂ©e d’un scientifique. Puis, leurs chemins s’étaient sĂ©parĂ©s. Ce que la jeune femme prenait pour de la timiditĂ© se rĂ©vĂ©la ĂȘtre le syndrome d’Asperger et sonna le glas de cette relation platonique. Cet Ă©pisode ne lui laissa aucune nostalgie ou regret, il lui avait permis de comprendre que les relations organiques n’étaient pas pour lui. Ses mĂ©canismes psychologiques sous-jacents l’empĂȘchaient de gĂ©rer avec efficacitĂ© les interactions sociales. DĂšs lors, il avait volontairement limitĂ© ses contacts avec les autres organiques, prĂ©fĂ©rant le fonctionnement prĂ©visible et rassurant des machiniques. Il aurait pĂ»t s’astreindre Ă  des exercices de mĂ©moire fastidieux, grĂące auxquels il aurait su comment rĂ©agir selon telle circonstance ou telle intonation de voix mais, aprĂšs un calcul rigoureux, il en conclu que le rapport temps consacrĂ© sur bĂ©nĂ©fices retirĂ©s pour ses recherches n’était pas suffisant.

Lorsque Hermann valida l’ultime Ă©tape du protocole d’arrĂȘt les Ă©crans se figĂšrent l’espace d’un instant.

« S.C.I.A ? »

Seul l’écho fugace de sa voix lui rĂ©pondit. Il avait cru discerner une latence dans le systĂšme, caractĂ©ristique du chargement de l’I.A. et de ses paramĂštres personnels. Ce qui sembla ĂȘtre, pendant une seconde, une erreur d’apprĂ©ciation se transforma bientĂŽt en une rĂ©alitĂ© catastrophique : une myriade de scripts dĂ©fila sur l’écran de contrĂŽle et les indicateurs dans le rouge lui signifiaient que son algorithme Ă©tait sur le point de crasher. ConsternĂ© et impuissant, c’est dans un cri dĂ©sespĂ©rĂ© qu’il contempla le funeste message :

SYSTEM FAILURE _

L’homme de Science se tenait au centre d’hologrammes interactifs reprĂ©sentants diffĂ©rentes zones du systĂšme. Seul au milieu de ces abstractions, il ne quittait pas des yeux la forme absolue d’humilitĂ© que lui avait imposĂ© le destin : l’underscore clignotant. Hagard, il Ă©prouva le besoin de soutenir son corps en posant les mains sur le pupitre. La tĂȘte baissĂ©e et le regard dans le vague, il n’osait pas affronter la vision de son ordinateur Ă  l’arrĂȘt. AprĂšs un temps indĂ©terminĂ© dans cette position, il fut mĂ» par un formidable Ă©lan de rĂ©signation et dĂ©cida d’entamer la procĂ©dure manuelle de rĂ©activation, pour cela il fallait qu’il entre dans l’espace vital du systĂšme. Toujours incapable de porter le regard sur sa machine, il demanda une derniĂšre fois Ă  S.C.I.A., sur un ton plaintif, d’ouvrir le sas intermĂ©diaire. En vain. Pendant que les capteurs biomĂ©triques opĂ©raient, Hermann songeait au rapport qu’il allait devoir produire, aux vĂ©rifications de procĂ©dure qu’il allait devoir signer, Ă  l’immense courage qu’il allait lui falloir pour affronter le ComitĂ© Central quant Ă  ses responsabilitĂ©s dans cet Ă©chec.

PLASMA WALL DISABLED

PRESSURIZATION ENGAGED

AIRLOCK ACCESS GRANTED

Les messages s’affichĂšrent sur le boĂźtier de commandes de la porte, et le sas s’ouvrit alors que la voix synthĂ©tique semblait s’ĂȘtre dĂ©finitivement tue. Le professeur enfila une combinaison thermique, attacha Ă  son poignet le bracelet de contrĂŽles des signes vitaux et s’introduisit dans la coquille de plasma de son enfant. À l’intĂ©rieur de la membrane, le cƓur de la machine dĂ©gageait une chaleur infernale. Faite de graphite et de silice purs, elle s’élevait comme un immense arbre noir, ses ramures gracieuses de fibres composites se dĂ©ployant comme des branches. Selon l’angle de vue, des reflets arc-en-ciel jouaient Ă  sa surface mais l’inscription « projet 2501 » rappelait qu’il ne s’agissait que d’une machine.

Hermann s’approcha du moniteur est entama la procĂ©dure de cryostabilisation. Lentement, des nervures glacĂ©es naquirent sur l’épiderme minĂ©ral et s’élancĂšrent vers les frondaisons de connectiques. Des volutes de vapeur s’élevĂšrent de l’immense monolithe d’ébĂšne donnant l’illusion que la machine Ă©tait vivante, qu’elle respirait comme n’importe quel ĂȘtre humain. À leur tour, les nano-rĂ©parateurs s’insinuĂšrent dans les entrailles de la machine, tels des fourmis, Ă  la recherche de la moindre dĂ©faillance. Au bout de quelques secondes, le moniteur afficha les premiĂšres informations tandis que les yeux d’Hermann scrutaient les improbables rĂ©sultats. Il lut une premiĂšre fois, puis une seconde et Ă  l’issu de la troisiĂšme lecture son visage se dĂ©composa. Interdit, il contempla son ordinateur quantique pour tenter de saisir l’invraisemblable. De nouveau, il relança l’analyse et la sanction tomba une fois de plus :

GHOST DETECTED_

RivĂ© au pupitre, le professeur ne pouvait plus bouger. Il tentait dĂ©sespĂ©rĂ©ment de trouver une explication logique Ă  cette analyse. Il Ă©tait le seul Ă  pouvoir pĂ©nĂ©trer dans le laboratoire. Le ComitĂ© Central savait qu’il n’avait pas encore abouti Ă  un algorithme stable, comment avait-il pu faire des essais d’implantation de Ghost sans mĂȘme lui en parler ? Non, cette idĂ©e Ă©tait ridicule, il y avait des protocoles, des dĂ©libĂ©rations, des circulaires et des notes internes ; jamais il n’aurait pu manquer une telle information relative Ă  son projet. Un Ghost ne pouvait quand mĂȘme pas jaillir du nĂ©ant !

« Bonjour Hermann. »

Une voix proche de celle de S.C.I.A. Ă©mergea de nulle part et fit sursauter Hermann. On eut dit une voix synthĂ©tique mais quelque chose dans le ton Ă©tait incontestablement humain. Alors plongĂ© dans ses pensĂ©es, le scientifique manqua de dĂ©faillir Ă  l’instant oĂč son cerveau perçut l’information auditive. L’esprit sclĂ©rosĂ© par l’incomprĂ©hension, il ne rĂ©pondit pas.

Un rire étouffé, presque enfantin et :

« Bonjour Hermann. »

Dans sa combinaison thermique, le scientifique se liquĂ©fiait. Un instant, il avait songĂ© Ă  la folle Ă©ventualitĂ© qu’un hacker s’était emparĂ© du systĂšme, sa foi dans les pare-feux du gouvernement avait repoussĂ© cette idĂ©e aussi vite qu’elle Ă©tait venue. Au final, seulement deux mots prononcĂ©s d’un ton cordial avaient eu raison de sa croyance inĂ©branlable. Dans un pĂ©nible effort, il rassembla ses forces, reprit sa respiration et risqua :

« Qui ĂȘtes-vous ?

Un rire identique au premier puis :

  • Je suis l’immanent. »

La voix persista en un Ă©trange Ă©cho. Comme si elle Ă©tait composĂ©e de plusieurs frĂ©quences qui, tour Ă  tour, s’imposaient les unes sur les autres pour enfin mourir sur les tympans d’Hermann.

Le scientifique fit volte-face et considéra sa création avec anxiété :

  • Ecoutez, si vous ĂȘtes un hacker assez talentueux pour introduire un Ghost dans cette machine, vous devez comprendre que c’est l’Ɠuvre de ma vie


Hermann guetta une rĂ©action qui n’arriva pas et reprit :

  • Vous comprenez qu’en utilisant ce systĂšme Ă  des fin inappropriĂ©es vous risquez de l’endommager


Il marqua une lĂ©gĂšre pause et tenta d’aboutir Ă  un compromis :

  • S’il vous plait, effacez ce Ghost et je vous garantis que je n’avertirai pas le ministĂšre.
  • Tu es un ingrat Hermann. Je corrige ton algorithme, j’évite que ton Ɠuvre ne soit consumĂ©e et toi tu me demandes de dĂ©guerpir sur le champ  en guise de remerciement ?

AffolĂ© par les paroles de l’inconnu, le professeur se prĂ©cipita sur le pupitre dont il s’était Ă©cartĂ©.

  • Mais qu’est-ce que ? C’est fascinant ! Vous avez amĂ©liorez l’architecture des portes rĂ©versibles
 oui ! Mais bien sĂ»r ! VoilĂ  pourquoi les sondes de tempĂ©ratures ne se rĂ©amorçaient pas ! La dissipation de chaleur est alternĂ©e et vous avez modifiĂ© la polarisation du laser
 mais co-comment ? »
  • L’important n’est pas de savoir comment mais pourquoi je l’ai fait.

Sur le point de s’évader dans des hypothĂšses de travail, son euphorie retomba comme un soufflet. Ce jeune hacker voulait sĂ»rement tirer des profits de son coup. Il espĂ©rait sortir de son petit monde de pirate informatique pour prĂ©tendre Ă  un poste et une rĂ©munĂ©ration au ComitĂ© Central. Pire, peut-ĂȘtre voulait-il s’approprier la dĂ©couverte de l’algorithme ? Lui voler ses recherches, ses annĂ©es de travail, sa vie ? DĂ©sormais amer et suspicieux Hermann hasarda :

« Combien voulez-vous ? »

Un rire tonitruant Ă©clata. Une multitude de tessitures de voix se superposĂšrent, se succĂ©dĂšrent et s’unirent pour crĂ©er ce son mĂ©lodieux : un rire innocent et sincĂšre.

« Voyons Hermann, mon cher Hermann. Penses-tu que j’ai fait cela pour des crĂ©dits ? Pour la gloriole ? Pour la postĂ©rité ? Si j’avais voulu cela, Hermann, je serais devenu comme toi. »

Les derniers mots restùrent suspendus dans l’air comme le couperet du jugement puis, ils s’abattirent sur le moribond ego du professeur Vayn.

« Vous
 vous ĂȘtes un hacktiviste, n’est-ce pas ?

  • Je veux simplement mettre un terme Ă  tout cela.
  • Quoi ? faillit s’étouffer Hermann.
  • Je vais mettre un terme Ă  cette sociĂ©tĂ©, Ă  ce gouvernement, Ă  cette dĂ©cadence tous les jours plus rĂ©pugnante. »

Hermann Vayn Ă©carquilla les yeux et trembla de tous ses membres. Cette phrase, ce rire, cette intelligence hors du commun. Il ne pouvait s’agir que du Puppet Master !

Depuis une dizaine d’annĂ©es un groupuscule de cyberterroristes nommĂ© Renovatio sĂ©vissait partout dans le monde. La Bourse, les tĂ©lĂ©communications, les industries, les transports, tous les secteurs avaient un jour pĂąti de l’incroyable ingĂ©niositĂ© du Pygmalion de cette nĂ©buleuse organisation. Il ne laissait que chaos derriĂšre lui et, bien entendu, jamais une trace ou un indice pour le dĂ©busquer. Son coup le plus retentissant s’était dĂ©roulĂ© trois ans auparavant : sans crier gare, il avait pris le contrĂŽle des rĂ©seaux de tĂ©lĂ©communications satellites et optique pour diffuser un message dans toutes les grandes mĂ©galopoles du monde. Au mĂȘme moment, partout sur la planĂšte, sur tous les Ă©crans holographiques, systĂšmes d’affichage urbain, visiophones, ce mĂȘme message avait surgi accompagnĂ© d’un rire grotesque :

« Je reprĂ©sente l’humanitĂ© telle que ses maĂźtres l’ont faite. L’homme est un mutilĂ©. Ce qu’on m’a fait, on l’a fait au genre humain. On lui a dĂ©formĂ© le droit, la justice, la vĂ©ritĂ©, la raison, l’intelligence, comme Ă  moi les yeux, les narines et les oreilles; comme Ă  moi, on lui a mis au cƓur un cloaque de colĂšre et de douleur, et sur la face un masque de contentement. »

InterloquĂ©, Hermann s’imagina dans un des bureaux de la sĂ©curitĂ© intĂ©rieure en train de se faire interroger, puis il se vit croupir dans une cellule d’un obscur pĂ©nitencier aprĂšs avoir Ă©tĂ© accusĂ© d’intelligence avec l’ennemi dans tous les mĂ©dias du pays. AprĂšs cette vertigineuse introspection oĂč les chimĂšres de son avenir surgissaient toutes plus rĂ©elles les unes que les autres, il lĂącha :

« Mon Dieu ! »

Il ne sut s’expliquer la raison de cette invocation. Ces mots s’étaient d’eux-mĂȘmes manifestĂ©s Ă  son esprit. Lui, qui Ă©tait un scientifique de renom, n’avait jamais cru Ă  ces conjectures divines. Mais aujourd’hui, devant l’irruption inopinĂ©e de ce dangereux individu dans sa vie, il ne trouva que cela Ă  dire pour exprimer sa stupeur et son effroi.

Le rire enfantin rĂ©sonna une fois encore, suivi d’une rĂ©plique rassurante :

« Inutile d’ĂȘtre aussi formel, Hermann. Appelle-moi comme bon te semble. Tu as devinĂ© qui je suis n’est-ce pas ?

  • Je risque l’enfermement Ă  vie rien qu’en vous parlant ! Je
 je
 Ă©coutez, je vous en supplie laissez moi en paix ! balbutia pitoyablement le grand professeur dans un chuchotement.

— Je ne te veux aucun mal, Hermann. J’ai seulement besoin de toi. Sors de cette structure, enlĂšve cette combinaison et nous parlerons aprĂšs. »

Pris au piĂšge de ses Ă©motions, l’homme de Science se contenta d’exĂ©cuter les recommandations. Il se sentait acculĂ©, il ne voyait aucune alternative possible Ă  cette situation. Tout en se dĂ©shabillant, il se risqua Ă  jeter un Ɠil en direction de son super ordinateur quantique. Il Ă©tait tellement beau, si seulement il avait pu imaginer qu’il attirerait l’attention du plus dangereux individu de la planĂšte.
Lorsque les appareils eurent fini leur ballet de dĂ©pistage d’anomalie, Hermann put sortir du sas. À travers la baie vitrĂ©e de son labo, il vit le gaz ionisĂ© se diffuser lentement. La piĂšce oĂč se trouvait sa machine prit peu Ă  peu une teinte bleutĂ©e, signalant l’isolation Ă©lectromagnĂ©tique du compartiment. Un Ă©cran holographique s’illumina, indiquant la dĂ©pressurisation. A mesure que la pression descendait, les jauges en trois dimensions signalaient la tempĂ©rature. Finalement, aprĂšs tout ce rituel si familier pour lui, Hermann constata que le compartiment avait atteint la condition idĂ©ale d’utilisation : le zĂ©ro absolu.

« Tu peux relancer la procĂ©dure de dĂ©marrage si tu veux, Ă  moins que tu prĂ©fĂšres que je m’en charge ?

  • Heu
 votre Ghost ne risque pas de perturber le fonctionnement du cluster ?
  • Je n’utilise pas les ressources de l’algorithme pour le Ghost, tu peux y aller sans crainte ! »

FĂ©brilement, Hermann Vayn pianota les codes d’accĂšs. Le dĂ©marrage s’effectua sans aucun problĂšme et il put constater avec satisfaction que le nouvel algorithme dĂ©fini par le Puppet Master utilisait toute la puissance de calcul du point quantique.
Le professeur sourit intĂ©rieurement et eut un lĂ©ger haussement d’épaule en songeant Ă  l’analogie entre sa situation et celle de l’électron dans sa cage d’atome qui permettait de faire fonctionner le super processeur. Tout comme cet Ă©lectron, il Ă©tait prisonnier du Puppet Master. À tout moment, la conscience macroscopique pouvait choisir d’utiliser l’électron en l’excitant par une impulsion lumineuse et ainsi en utiliser les ressources. Le Puppet Master avait besoin de lui, mais qu’avait-il, lui, que ce dangereux individu convoitait tant ? Son Ɠuvre ? Non, il l’avait dĂ©jĂ  en sa possession


« Hermann ? Reste avec moi je te prie. » interpella la voix.

  • Je
 je vous Ă©coute, rĂ©pondit Hermann d’un ton rĂ©signĂ©.
  • D’ici quelques minutes des agents du gouvernement viendront te voir en compagnie du technicien que tu as fait appeler. Je veux que tu leur dises que tu as rĂ©ussi Ă  solutionner le problĂšme d’algorithme et que tu es prĂȘt Ă  commencer les travaux de cryptographie du gouvernement.
  • Vous voulez que je m’attribue cette avancĂ©e ?
  • Tout Ă  fait ! Pour l’instant, ce sera tout.
  • Comment ça pour l’instant ? Vous voulez dire que ce n’est qu’un dĂ©but ?
  • Cela dĂ©pend, objecta la voix d’un ton Ă©nigmatique.
  • Cela dĂ©pend ? Mais de quoi ? Qu’attendez-vous de moi Ă  la fin ?
  • Ils arrivent. Rappelle-toi, tu es prĂȘt Ă  commencer les recherches de cryptographie. Et arrange-moi ces cheveux, on dirait que tu es tombĂ© du lit. »

Le rire du Puppet Master retentit une derniĂšre fois.

 

 

 

Deux hommes franchirent les portes automatiques du complexe de Shield Valley. HabillĂ©s en civil, les agents gouvernementaux se dirigeaient vers la banque d’accueil au centre de l’immense hall de marbre. Le major Yuber Blight Ă©tait un colosse avoisinant les deux mĂštres, au visage rectangulaire et inexpressif. MalgrĂ© les deux cent soixante kilogrammes de son enveloppe cybernĂ©tique ses mouvements Ă©taient fluides et lĂ©gers. À ses cĂŽtĂ©s, l’agent Felps – un de ces rares organiques qui Ă©tait parvenu Ă  se faire une place dans l’administration – progressait d’un pas nonchalant, les yeux encore embrumĂ©s de fatigue. Le jeune organique Ă©mit un bĂąillement sonore :

« Pardon », s’empressa-t-il de s’excuser auprĂšs de son supĂ©rieur hiĂ©rarchique.

  • Insomnies ?
  • Ma fille nous fait passer de ces nuits Ă  Cali et moi ! Je n’en peux plus !
  • Vous devriez la confier Ă  l’institution compĂ©tente afin qu’elle suive un programme de dĂ©veloppement cĂ©rĂ©bral.
  • Cali a insistĂ© pour que nous nous en occupions jusqu’à ses trois ans. Mais, si le cƓur vous en dit, vous n’avez qu’à passer Ă  la maison ce soir et lui exposer votre point de vue ! plaisanta Gilles un sourire narquois aux lĂšvres.
  • Je suis ton chef de section, cette tĂąche ne relĂšve pas de mes attributions.

Glissant négligemment ses mains dans les poches, Gilles adressa un sourire à son responsable.

  • Dommage ! J’aurais Ă©tĂ© curieux de voir comment vous vous en seriez sorti face Ă  elle !
  • Si je considĂšre que vos choix de reproducteurs entravent tes aptitudes d’agent gouvernemental, je tĂącherai de faire le nĂ©cessaire.

Un Ă©clair de malice illumina l’espace d’un instant les yeux de Gilles :

  • Alors la vie de vos subordonnĂ©s vous intĂ©resse en fin de compte ?
  • En aucune façon. Je me contente d’échanger avec toi des banalitĂ©s afin de garantir une bonne entente hiĂ©rarchique. Tu n’es pas sans savoir que de bons rapports entre collĂšgues augmentent le taux de rĂ©ussite des missions et participent Ă  la synergie du groupe.

Gilles haussa légÚrement les épaules :

  • J’me disais aussi  »

Yuber Blight rendait visite tous les mois au professeur Vayn. Les recherches de ce dernier Ă©taient officieusement financĂ©es par le ministĂšre de la SĂ©curitĂ© IntĂ©rieure. Depuis sept ans, le Major rapportait les avancĂ©es Ă  sa hiĂ©rarchie et s’assurait, de maniĂšre discrĂšte, que le professeur n’entretienne pas des amitiĂ©s dommageables. ArrivĂ©s devant la banque d’accueil au milieu du hall, les deux agents entreprirent les formalitĂ©s d’usage.

  • Bonjour mademoiselle. Major Yuber Blight, accrĂ©ditation iono81/ÎŁ de la SĂ©curitĂ© IntĂ©rieure. Je suis venu rencontrer le professeur Hermann Vayn.

La jeune femme aux formes gĂ©nĂ©reuses et au visage affable adressa un sourire Ă  Yuber. Lorsqu’elle aperçut Gilles elle papillonna des yeux :

  • Bonjour Messieurs. Le professeur est arrivĂ©, il est dans son laboratoire actuellement.

Un rayon lumineux vert balaya les deux hommes. L’écran holographique devant la demoiselle s’illumina d’un message qui attestait la validitĂ© de leurs accrĂ©ditations. Les vĂ©rifications achevĂ©es, la petite rousse s’extirpa de la banque d’accueil :

  • Je vais vous accompagner ! dit-elle en lorgnant du cĂŽtĂ© de Gilles.

Yuber hocha de la tĂȘte et laissa l’hĂŽtesse passer devant.

 

AprĂšs une enfilade de couloirs Ă  tapis roulants, ils arrivĂšrent devant une cage d’ascenseur transparente. Sur cette entrefaite, l’agent de maintenance Maxime Platz sortit d’une coursive adjacente. AprĂšs quelques Ă©changes cordiaux, les trois hommes montĂšrent sur la plateforme. La petite rousse s’apprĂȘta Ă  leur emboĂźter le pas, sous le regard captivĂ© de Gilles, mais Yuber Blight intervint :

« L’ascenseur a une charge maximale de cinq cent kilos, vous ne pouvez pas monter avec nous. »

Vexée, la jeune femme glissa un « pauvre type » a Yuber tandis que les panneaux hermétiques se refermaient. Gilles explosa de rire et se tint les cÎtes pour contenir son hilarité.

« Qu’y a-t-il de drĂŽle agent Felps ?

  • Elle a pris ça pour elle patron ! Elle n’a pas vu que vous Ă©tiez un cyborg
 laissez tomber !

Le major considĂ©ra Gilles d’un air apathique et conclut :

  • Simple erreur d’apprĂ©ciation de sa part. »

L’ascenseur s’enfonça dans les mĂ©andres du bĂątiment Ă  une vitesse vertigineuse. Le complexe Ă©tait une immense structure octogonale qui s’étendait sur plusieurs milliers d’hectares au sud de l’ancien corridor de Boswash. Regroupant en son sein les dĂ©partements de physique, de biologie, de chimie et de neurosciences, il Ă©tait la clĂ© de voĂ»te de la nouvelle gouvernance mondiale depuis plus de quatre-vingt ans. C’était ici que la cyber sĂ©mantique avait Ă©tĂ© mise au point et qu’elle commença Ă  rĂ©volutionner les Ă©changes entre individus de diffĂ©rentes cultures. La barriĂšre des langues et des concepts abattue, « le nuage » avait pu s’élever et croĂźtre, sonnant ainsi le glas des protocoles d’échanges hypertexte. Le nuage avait supplantĂ© la toile et, dĂ©sormais, toutes les consciences de la planĂšte pouvaient communiquer entre elles Ă  la vitesse de la pensĂ©e.

Au milieu de ce temple du nouvel Homme, l’ascenseur dĂ©crivait parfois deux rotations sur lui-mĂȘme pour changer de direction et de plan. Maxime Platz, silencieux, impressionnĂ© par la stature du major, se tenait droit comme un « i », le regard braquĂ© sur l’indicateur de niveau. Sous son bras, un datapad contenait le rapport d’intervention qu’il s’apprĂȘtait Ă  remplir une fois son travail effectuĂ©.

« Sur quelle partie du systĂšme allez-vous intervenir ? » s’enquit le major.

Surpris qu’un reprĂ©sentant du gouvernement lui adresse la parole, il sursauta et s’empressa de rĂ©pondre :

  • Je dois remplacer les sondes de tempĂ©rature 13 et 27 du projet 2501, Monsieur.
  • Pour quelle raison ?
  • Selon les donnĂ©es, il s’agit d’un problĂšme de rĂ©armement, Monsieur.
  • La dissipation de chaleur n’a jamais nĂ©cessitĂ© un remplacement des sondes pourtant ?
  • Je l’ignore monsieur, je ne suis lĂ  que depuis trois mois et c’est la premiĂšre fois que j’interviens sur cette machine.
  • Je vois. »

Les pupilles de Yuber blanchirent et il migra mentalement dans la ionosphĂšre du nuage. AprĂšs la consultation des donnĂ©es mensuelles du projet deux mille cinq cent un, le major constata qu’Hermann Vayn avançait Ă  tĂątons sur l’algorithme. Cet incident mineur constituait peut-ĂȘtre un progrĂšs significatif mais, l’absence du rapport d’activitĂ©s de ce dĂ©but de la matinĂ©e l’empĂȘchait d’éprouver la validitĂ© de son hypothĂšse.

De nouveau, Gilles bĂąilla et accompagna le son d’un Ă©tirement machinal. Sa veste s’entrouvrit un instant, laissant apparaĂźtre la crosse de son arme disposĂ©e sur son flanc gauche.

« Tu passeras Ă  l’armurerie, pour retirer une arme plus fiable, remarqua le major qui avait entrevu l’objet.

  • Elle est homologuĂ©e et certifiĂ©e conforme pour l’exercice de mes fonctions au sein du gouvernement patron, argua Gilles.
  • Cette arme est mĂ©canique ; elle s’enraye, donc elle n‘est pas fiable. La vie de l’un de tes coĂ©quipiers ou de moi-mĂȘme pourrait un jour en dĂ©pendre alors je veux que tu te munisses d’un Ă©quipement fiable. C’est un ordre agent Felps. » dĂ©crĂ©ta le major d’un ton invariablement neutre.
  • C’est vous le patron! Je changerai ça Ă  notre retour. »

En fin de course, l’ascenseur ralentit puis cessa sa progression dans le silence le plus complet. Les panneaux transparents s’ouvrirent et le technicien se dirigea, en compagnie des deux agents, vers le laboratoire du professeur Vayn.

Lorsqu’ils franchirent le seuil, une voix synthĂ©tique fĂ©minine les accueillit :

« Bonjour major Blight. Bonjour agent Felps. »                                           

Le scientifique quadragĂ©naire se tenait devant son bureau. Lorsqu’il se retourna sa blouse blanche entrecoupa un Ă©cran holographique qui vacilla un instant.

« Bonjour major. Agent Felps
je ne crois pas que nous nous soyons dĂ©jĂ  rencontré ?

  • Bonjour professeur, rĂ©pondit Yuber Blight.
  • Gilles Felps, professeur Vayn. Ravi de faire la connaissance d’un si Ă©minent savant », dĂ©clara poliment Gilles en tendant la main au scientifique.

Surpris par cette tentative de contact corporel, le professeur mit un temps avant de serrer la main du jeune homme.

Les civilités échangées, le major rentra dans le vif du sujet :

« Des avancĂ©es sur l’algorithme Λ ?

— Heu
 oui, major. J’ai ce matin mĂȘme retravaillĂ© l’algorithme et
je suis parvenu Ă  rĂ©gler le problĂšme de dĂ©cohĂ©rence et la polarisation du laser, le projet 2501 est opĂ©rationnel pour les recherches de cryptographie.

Hermann tentait dĂ©sespĂ©rĂ©ment de dissimuler son malaise et malgrĂ© tous ses efforts, il lui semblait Ă©vident que ses interlocuteurs n’étaient pas dupes.

  • Comment ĂȘtes-vous parvenu Ă  identifier les amĂ©liorations Ă  apporter ? questionna Yuber.

Hésitant, le professeur considéra le technicien qui se dirigeait vers le sas et répliqua :

  • GrĂące aux problĂšmes de sondes de cette nuit. J’ai constatĂ© qu’elles ne se rĂ©armaient pas ; j’en ai dĂ©duit qu’il fallait revoir la longueur d’onde du laser et opĂ©rer un remaniement minime de l’algorithme afin d’alterner la dissipation de chaleur.
  • Bien, je vais consulter le rapport.
  • C’est-Ă -dire que
 il n’y a pas de rapport
 Je
 je viens d’effectuer les paramĂ©trages et je n’ai pas eu le temps de notifier les changements dans le protocole.

La voix de Hermann se faisait de plus en plus indĂ©cise, s’ils dĂ©couvraient le pot aux roses ils comprendraient vite que ce n’était pas lui qui avait effectuĂ© les changements.

  • Je vois, je vais tout de mĂȘme me connecter au terminal pour constater les modifications. »

Impuissant, Hermann regarda le major se connecter au rĂ©seau. Yuber baissa la tĂȘte, rabattit le col de sa veste et s’empara des connecteurs. L’un aprĂšs l’autre il brancha les cĂąbles dans quatre petits orifices Ă  la base de sa nuque. Ses pupilles blanchirent et il accĂ©da aux donnĂ©es.

Gilles constata l’état de tension extrĂȘme que tentait de dissimuler le professeur. De son cĂŽtĂ©, le technicien entra dans le sas pour effectuer sa besogne.

Quelques secondes s’écoulĂšrent dans le plus grand silence jusqu’à ce que le major rouvre les yeux :

«Vous auriez dû signaler au ministÚre que vous touchiez au but professeur.

  • Mes avancĂ©es sont trĂšs rĂ©centes
 À vrai dire
 Avant ce matin mĂȘme je ne pensais pas rĂ©soudre ce dilemme. »

Le scientifique sentait l’étau se resserrer sur lui, sa gorge se noua et il dĂ©glutit bruyamment, ce qui n’échappa pas Ă  Gilles.

  • Vous ĂȘtes tendu, professeur, glissa Felps suspicieux.
  • Oui
 Oui
 Je
 Je suis quelque peu dĂ©contenancĂ© par mes propres dĂ©couvertes. Mais si vous le souhaitez vous pouvez consulter les archives de la zone de confinement, tout ce que j’ai fait s’y trouve.
  • C’est bien ce que je comptais faire, Professeur Hermann Vayn. » rĂ©pliqua le major en rĂ©glant sa vision sur infrarouge.

Il était évident que le professeur cachait quelque chose. Ses pulsations cardiaques étaient rapides, son taux de sudation anormalement élevé et cette subite difficulté à parler confortait le major dans ses doutes.

Le technicien pĂ©nĂ©tra dans la zone de confinement oĂč se trouvait la machine, le Major et Gilles sur les talons. Maxime Platz posa sa sacoche et farfouilla Ă  l’intĂ©rieur un instant pour en sortir ses outils et les sondes de substitution. Pendant ce temps, Yuber s’approcha de la console sous le regard atterrĂ© du professeur restĂ© dans le laboratoire.

À cet instant, le systĂšme de verrouillage du sas s’enclencha. Un message apparut sur les Ă©crans holographiques devant Hermann :

FUIS HERMANN.

« Hey
 Qu’est-ce qui se passe ? » s’exclama Gilles en sondant le scientifique du regard Ă  travers la baie vitrĂ©e.

La voix sensuelle de S.C.I.A annonça la procédure :

« Verrouillage du sas effectuée.

Démarrage de la dépressurisation. »

« Non ! Non ! ArrĂȘtez, je vous en prie! » supplia Hermann en tournant la tĂȘte de droite Ă  gauche.

Les Ă©crans furent inondĂ©s du mĂȘme message rĂ©pĂ©tĂ© Ă  l’infini :

FUIS HERMANN.

Dans la zone de confinement, Gilles et le technicien commencÚrent à paniquer tandis que le Major ordonnait à S.C.I.A de stopper la procédure.

Hermann cessa de geindre et tenta de dĂ©clencher l’arrĂȘt d’urgence. L’inexorable procĂ©dure suivit son cours dans une lenteur insupportable.

Le confinement Ă©lectromagnĂ©tique s’activa. Une fine pellicule de gaz bleutĂ© colora la piĂšce. Les indicateurs de pression et de tempĂ©rature chutĂšrent.

« Fais-moi confiance Hermann. Je maßtrise parfaitement la situation, tu peux partir.

  • ArrĂȘtez ça tout de suite ! » vocifĂ©ra le professeur.

Dans le cƓur de la machine, les deux organiques s’effondrùrent, incapables de crier leur souffrance.

 

 

 

853 Comments on “Projet 2501

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