Le mélange contrarié des anges : chapitre IX : « le collier d’Ibiza »

      Chapitre IX : « le collier d’Ibiza »

 

Le père d’Alexandre conduisit son fils jusqu’à l’aéroport de Roissy.Depuis qu’Alexandre était parti de la demeure familiale, le père avait fait la rencontre d’une femme et en avait été tout de suite séduit. Au cours d’une soirée de jour de l’an,Ils avaient partagé leur secret : Yolande était également veuve et ils s’étaient suffisamment rapprochés l’un de l’autre pour se fréquenter régulièrement et échafauder des projets d’avenir. Et pendant que le père ,au volant , lui racontait tout cela, Sa nouvelle vie, son bonheur retrouvé, il lui donna des nouvelles de son frère.

Celui-ci était aussi parti du nid familial pour vivre à Rueil-Malmaison chez une femme un peu plus Agée que lui. Que la maison était calme sans eux ! Le père d’Alexandre projetait d’ailleurs d’aller revivre chez sa mère afin de bénéficier d’un peu de compagnie et en attendant de pouvoir s’installer avec sa belle.

 Alexandre était heureux de pouvoir ainsi discuter avec son père. Depuis deux ans qu’il vivait avec Bahia il l’avait peu revu et c’était incroyable comme son père incarnait à ses yeux tout un passé d’excès et de bonheur. Bonheur de vivre et d’aimer Bahia, bonheur d’être entouré d’une multitude d’amis fêtards, bonheur de vivre en famille sans avoir à se soucier de rien.  Car si son contrat à durée déterminée au Louvre s’était terminé quelques mois auparavant, Alexandre arrivait en fin de droits ASSEDIC et après ses vacances ,il devrait se remettre à rechercher du travail .

 Alexandre prenait l’avion quasiment pour la première fois de sa vie. Au décollage, il avait senti frémir en lui l’aura des vacances avec sa ville, son pays qu’on quitte , l’inconnu qui s’offrent à vous, et avec lui tout son lot de dépaysement. Le nez collé sur le hublot, Alexandre avait goûté la corolle des  nuages que l’avion survolait ou pénétrait. C’était merveilleux de voir le paysage de Si haut ! Puis, L’avion avait atterri. La porte s’était ouverte sur une atmosphère à 32 °C. En descendant Alexandre s’était senti subitement enveloppé dans un manteau de chaleur. Le décor devant ses yeux lui évoquait un paysage plutôt désertique, avec dans l’air une légère poussière de sable, des palmiers tout  autour évoquant une végétation méditerranéenne. Elza l’avait accueilli en se jetant dans ses bras. Elle était toute bronzée, depuis une semaine qu’elle lézardait sur les plages d’Ibiza. Ses cheveux ondulés pas encore sec retombaient sur un T-shirt court aux épaules et lâche autour du cou, sous lequel ses petits seins pointaient. Le T-shirt, kitsch, surmontait un short riquiqui Lequel laissait apparaître de longues jambes bien dessinées que des bottes cachaient  jusqu’aux mollets : Elza était superbe.

 Son petit brin de femme l’invita à bord d’un gros 4×4 à serpenter à travers de petites routes bordées de forêts espagnoles dont le vert des arbres paru tout de suite inhabituel à Alexandre .À Ibiza,la végétation abreuvée sans doute par trop d’exubérance solaire, arborait des nuances de verts fluorescents, ou disons d’un vert émeraude superbe !  À 5 km de l’aéroport, la voiture quitta la route pour prendre un petit sentier longé de villas dont les fleurs qui les décoraient étaient d’un ton rouge et violet irréel . Ils s’arrêtèrent un peu plus haut, dans la cour d’une immense demeure agencée autour d’une piscine aux reflets bleu pale très purs dans lesquels venaient  danser les entrelacs infinis des rayons du soleil .

 Elza convia Alexandre à la suivre dans une bâtisse plus éloignée. Il entra dans une grande pièce ayant une cuisine américaine ,visita les deux chambres. La maison était bordée d’une petite piscine qui surplombait une étendue d’arbre vert fluorescent, des villas en contrebas perdues au milieu des arbres, tandis qu’ au loin se dessinait la ligne d’horizon d’une mer d’un bleu de Prusse piquant, laquelle mer  semblait perdu au milieu de cette végétation touffue et dense à la chlorophylle magique.  La forêt luxuriante au milieu de laquelle ils étaient ,comptait, Alexandre les dénombra,  jusqu’à 14 verts d’un ton fluorescent différents.

 Après qu’il eut posé ses valises, Elza se laissa effeuiller docilement sur un matelas posé à même le sol de la pièce. Il remarqua tout de suite qu’Elza ne portait plus le joli collier qu’il lui avait offert et qu’elle avait jusque là gardé sur elle sans jamais le quitter tel le symbole de leur amour. Elza resta très discrète sur la façon dont elle l’avait perdu, incitant Alexandre à l’embrasser plutôt que de penser à ce symbole qu’elle semblait maintenant considérer comme enfantin,  Naïf et ridiculement niais.Alexandre qui aimait Elsa d’un amour il est vrai un peu naïf, en fut touché et blessé. Pendant qu’ il la déshabilla il ne put s’empêcher de penser à un acte de félonie de la part d’Elsa. Ne l’aimait-t’elle  plus comme avant ou alors était-ce cette île de toutes les tentations  qui l’avait transformée pendant son absence, avec ces fêtes arrosées de drogue, sa musique techno envoûtante et destructrice de tout amour romantique, ses amours faciles où le collier avait du être arraché durant un ébat sauvage, sur une plage d’Ibiza, ou dans ce lit lui- même où Alexandre, perturbé, lui faisait mollement l’ amour, sans ressentir lorsqu’il fut en elle la même magie qu’autrefois.  Elle le remarqua et ne lui en tint pas rigueur. Après tout, comme elle le disait souvent, rien ne les obligeait à une performance sexuelle qu’elle jugeait par ailleurs ridicule .

 Mais à partir du moment où Alexandre avait posé les pieds dans la villa et depuis le moment où il avait remarqué la disparition du collier, rien ne fut plus pareil entre eux. Elza se montrait moins aimante, plus acerbes et distante face à la romantique étreinte d’Alexandre dont elle jugeait le manque d’autonomie rédhibitoire. Elle revendiquait des moments de solitude et d’indépendance que contrariaient les élans d’Alexandre, toujours prompt à la prendre dans ses bras et à la couvrir de baisers étouffant. Alexandre en fut vivement affecté. Heureusement il y avait le soleil et la magie d’Ibiza qui le distrayait. Avant d’aller s’étendre sur une plage couverte d’un monde bigarré et aux corps décorés de Persings, de tatouages tribaux , Alexandre et Elza se rendaient dans le centre-ville sur un des scooters qu’ils avaient loué.  Hormis la vieille ville Et son port dominé par un fort rustique aux rues pavées bordées de commerçants en tous genres et qu’Alexandre trouvait fort charmant, la nouvelle ville aux immeubles bas lui semblait des plus quelconque et il se demandait en lui-même pourquoi Ibiza était tant prisée. Il n’avait pas encore eu la possibilité d’en apprécier les fêtes des boîtes de nuit ,nombreuses au kilomètre carré dans Ibiza même, et qui faisaient toute la renommée de l’île.

Alexandre passa la première semaine presque exclusivement en compagnie d’Elza. Loin du corps de bâtiment principal de la villa , qu’occupaient le frère d’Elza avec ses amis. Le soir, Alexandre entendait la musique envoûtante de leurs fêtes, sans pouvoir y participer comme Elza ne souhaitait pas se mêler aux amis de son frère. Alexandre les imaginaient autour de la piscine, après un dîner au barbecue, dansant nu. Certainement devaient-ils être en compagnie de naïades rencontrées en boite de nuit. Certainement n’étaient-elles pas les dernières à boire, fumer des joints,s’emplir le nez de coke,ou à se disjoncter les neurones à grands coups d’extasy ou d’acides …

Ce ne fut qu’une semaine plus tard, lorsque les amis terribles furent envolés que les parents et la soeur d’Elza , julie accompagnée de son mari, débarquèrent à Ibiza. Alexandre et Elza investirent une chambre proche de celle de Julie et son mari , qui longeait la grande piscine de la villa. Disposée en « U » autour de la piscine , la villa abritait aussi les chambres de Fulvio, le cousin et du frère qui avait cédé sa grande chambre aux parents qui prirent position de l’autre cote de la piscine,dans un bâtiment séparé. L’après-midi les deux soeurs nageaient longuement au milieu des ondulations lumineuses de la piscine. On écoutait de la musique, tout en lézardant sur les transats. Les un lisant, d’autres discutant. Alexandre se roulant des joints pour avoir le plaisir de les griller en pleine chaleur, la tête envoûtée de rêves. Car tout cela le faisait rêver. Alexandre adorait la famille d’Elza, son père si gentil et classe, sa soeur si prévenante à son égard. Bien sûr, il déplorait l’éloignement récent d’Elza et se demandait si il était possible qu’Elza soit devenue si soudainement indépendante, sans oser imaginer qu’elle puisse être moins amoureuse.

Un soir, tandis que les deux soeurs jumelles, fatiguées, s’étaient retirées dans leur chambre respective, Alexandre était resté au bord de la piscine à deviser avec le mari de Julie. Ils semblait bien s’apprécier tous les deux. Lui était originaire de New Delhi. Il avait rencontré julie au cours de ses études de commerce international. Et pendant un voyage à Las Vegas, sur un coup de tête, loin de leur famille, le couple avait décidé de se marier ; ne faisant, à leur retour, qu’une petite fête en cercle restreint pour marquer l’événement. Le père de julie , comme à son habitude si respectueux des décisions de ses filles, avait tout de suite accueilli la nouvelle avec bonheur ; chérissant ce nouveau gendre qui lui offrirait peut-être un petit fils un jour. Cela faisait quatre ans que Julie avait épousé son mari. Avec l’aide du père , ils avaient pu créer cette fameuse start up  dont les bénéfices s’annonçaient enfin substantiels.

Alexandre et le mari de Julie avaient trop bu au point d’être saouls comme des cochons. Le haschisch les avaient mis d’humeur à faire la fête. Aussi décidèrent ils de partir sans les filles s’encanailler dans les discothèques d’Ibiza, histoire pour Alexandre d’enfin goûter à la véritable magie de l’île. Ni l’un ni l’autre n’en avait le droit car ils n’avaient pas le permis : ni une ni deux, les compères de beuverie volèrent un des scooters de la famille , et décrétèrent que mordicus ils se rendraient en ville quitte à braver la nuit noire qui avait enveloppé Ibiza.

Alexandre conduisit. L’attention nécessaire au bon maniement du scooter l’avait dégrisé. Le vent qui s’engouffrait dans ses yeux , lui giflait aussi la face comme pour le maintenir éveillé et en alerte. sous sa main la manette d’accélération faisait vrombir le moteur dans leurs oreilles. Tous deux trépignaient à l’idée de cette escapade interdite. Elle leur semblait une salutaire bouffée d’oxygène au relent de mystère et d’inconnu. Allaient-ils retrouver le chemin de la villa distante de plusieurs kilomètres du centre-ville ? Peu leur importait : c’était les vacances et Ibiza la séductrice lascive allait se livrer à leurs yeux de novices. Alexandre  reconnu , arrivé au rond point donnant sur le centre-ville, le chemin à travers les rues illuminées, qui les mèneraient au vieux port où étaient les boites de nuit. Une fois rendu, ils palpitaient d’émotion en garant le scooter devant la boite : la rue noire de monde étaient pleine de scooters, moyen habituel des habitants d’Ibiza pour se déplacer. Il devait y avoir une cinquantaine de scooter alignés contre le trottoir.

Devant Alexandre ahuri, le mari de Julie déboursa cinq cents francs par personne pour s’acquitter du droit d’entrée. La situation parut surréaliste à Alexandre habitué à la centaine de francs des boites de nuit parisiennes qu’il fréquentait. La boite était noire de monde et gigantesque. Plusieurs pistes de danse, autant de dj, partout des lumières colorées projetées sur les murs avec des flash stroboscopiques. des bars dans toutes les salles et tout le monde qui paraissait déchiré à déjà deux heures du matin. Filles comme garçons d’ailleurs , lesquels étaient un condensé de persings,tatouages et tenues de jet setter. Toutes les nations se mêlaient sur la piste, des allemands, nombreux à Ibiza, aux espagnols bien sûr, en passant par les anglais et les français. Alexandre se fit la réflexion qu’il fallait être riche ici pour s’amuser. Le prix d’une seule boisson équivalait le prix d’entrée des boites  de Paris : cent francs ! Cela le laissa songeur… . Ils restèrent trois heures dans la boite, passant leur temps à vaquer d’une piste de dance à l’autre, d’un bar à l’autre, finissant de se saouler dans l’ambiance électrique des  rythmes de la techno aux sons synthétiques calqués sur les battements de coeur . Sons envoûtant et dévastateurs …

Ils repartirent tandis que le soleil n’était pas encore levé, à la limite de la nuit et du jour. Au sortir de la ville, tandis qu’ils arrivaient au rond point un spectacle tragique les pétrifiait d’horreur. A l’entrée du rond point : une voiture arrêtée, le capot encore fumant. Devant elle un scooter renversé et le cadavre d’un jeune homme, immobile, la tête encastrée dans le pare-brise. Le jeune homme ne portait pas de casque, les deux passagers de la voiture pas de ceinture non plus, avaient la tête ensanglantée et également encastrée dans le pare-brise. Tous les trois étaient gravement blessés ou mort.  Aucun ne bougeaient. La police était déjà sur le lieu de l’accident : un agent régulait la circulation, attendant que ne vienne une ambulance. Un instant Alexandre cru qu’ils seraient contrôlés et sommés de présenter un permis de conduire, ce qui ne se produisit pas.  Les flics espagnols les laissèrent passer . Ils étaient tout heureux d’avoir franchi le contrôle, heureux et bourrés, eux qui avaient déjà bien du mal à croire que dans leur état, ils pourraient retrouver leur chemin…

Ils racontèrent leur aventure aux deux sœurs dans l’après-midi. Elles les réprimandèrent doucement d’autant de légèreté, les exhortant de ne plus prendre autant de risques . Alexandre venait de goûter aux fabuleuses nuits d’Ibiza … et bien la boîte de nuit à l’effervescente ambiance ne lui avait pas semblé si dépaysante finalement.

La famille d’Elza resta dix jours, durant lesquels on se régala de viande grillée, de chipolatas et de succulentes salades. On fit quelques mémorables sortie encore, puis tout le monde partit. Alexandre et Elza restèrent en  tête à tête, dans une ambiance de plus en plus morose pour leur couple. C’est alors que Elza dont sa torpeur envers les hommes avait dû la reprendre, fondit en larmes à l’idée de quitter ses chats et entra dans une colère monstre devant l’apathie et l’indifférence que lui témoignait Alexandre qui se sentit démuni comme une poule à qui on vient de couper la tête, devant tant de simagrées. Bien mal lui avait pris , entre eux ce fut bel et bien fini. Elza souhaitait même qu’il reprenne l’avion immédiatement. Il ne sût pas pourquoi elle se ravisa.

Tout de même ils firent chambre à part et seulement quatre jours après Alexandre lui demanda si ils pouvaient faire l’amour une dernière fois . Elza consentit à lui ouvrir son lit. Il la fourragea avec force et détermination, un peu violemment même, en se gardant consciemment d’être tendre . Et après avoir éjaculé il la sodomisa, tirant sur ses cheveux, lui griffant le dos en agitant son joli petit cul dans tous les sens au point de la faire jouir. Après, Elza fut plus calme, elle était moins agressive et redevenue presque tendre avec Alexandre. C’est fou, dit-elle, comme un bon coup de bite… et… je ne sais pas… tout est bien … .

Certes ce fut le cas quelques jours, malheureusement l’attention nouvelle qu’ils se consacraient l’un à l’autre retomba, et Elza se montra jusqu’à la fin un peu distante et méchante. Ils firent encore quelques jolies balades sous le soleil merveilleux d’Ibiza, découvrirent des plages désertes et fabuleuses où les ibicencos, à même le sable, créaient des empilements de galets comme autant d’autels mystiques dédiés à l’immensité. Ils se rendirent encore et toujours sur les créneaux du fort d’Ibiza pour admirer la mer et le port…

Dans l’avion du retour, Elza se montra très douce et demanda à Alexandre qu’il la prenne dans ses bras. Il espéra que leur idylle reprenait vie, elle de lui faire savoir qu’elle ignorait la raison de ce besoin d’être rassurée. Tous les deux de passer le reste du voyage à rêver chacun dans son coin, pour, à Paris, se séparer et repartir chacun de son côté, Alexandre la mort dans l’âme.

Le périphérique parisien parut bien terne à Alexandre. Il faisait beau pourtant. Il y a que ses yeux étaient encore tout impressionnés et imbibés des lumières d’Ibiza, ses couleurs, ses collines aux arbres dont le vert est si particulier. C’est exactement cela, lui manquaient à Paris la fluorescence de la végétation, ces verts si piquant et cette incomparable odeur de vacances. Son père venu le chercher dîna avec lui dans son petit deux pièce. Alexandre raconta ses vacances, l’éloignement d’Elza, son désespoir, l’amour qu’il lui vouait toujours et cette rupture incompréhensible… Elza était un petit brin de femme bien étrange décidément.

 

 

 

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